FOCUS COMÉDIE À L’ITALIENNE

Deux aspects de la comédie à l’italienne

SAMEDI 2 AVRIL
SOIRÉE COMÉDIE À L’ITALIENNE
17H30 Séduite et abandonnée
21H Les Lycéennes redoublent

Page 25 Seduite et abandonnée visuelCe que l’on appelle du nom générique de « Comédie (à l’) italienne » recouvre en fait un champ immense, qui se déroule sur plusieurs dizaines d’années de production, et qui concerne des productions, des cinéastes et des comédiens d’une très grande diversité. Des grands maîtres (Scola, Risi…) aux modestes artisans, de cinéastes moins connus de nos jours (Luigi Zampa) à des tâcherons anonymes, des comédiens de très haut rang à des figures populaires moins nobles mais souvent de grand talent. Dans son ensemble, la comédie italienne a néanmoins comme caractéristique d’être toujours le reflet fidèle ou déformant (dans la tradition caricaturale) de la société de son temps, des ses tares, ses faiblesses, ses travers et ses ridicules. Les deux films réunis ici semblent de prime abord très différents, et de fait ils expriment deux aspects de la comédie assez éloignés l’un de l’autre mais complémentaires.

Séduite et abandonnée est une des œuvres majeures de Pietro Germi, un des cinéastes les plus reconnus de la comédie à l’italienne « classique », un de ceux qui, à proprement parler, en ont fait un genre  noble . Germi sera d’ailleurs couronné au Festival de Cannes pour son film suivant (Ces messieurs dames), comme un hommage au genre dans son ensemble ainsi qu’à sa carrière particulière. Il met ici en vedette une des grandes stars féminines de l’époque, Stefania Sandrelli, à la plastique irréprochable et au talent évident. Dans ce qui est en fait une « comédie sicilienne », elle se retrouve entourée d’hommes tous plus lâches, idiots, et surtout tous plus frustrés les uns que les autres. Dans un magnifique noir et blanc et dans une mise en scène particulièrement soignée, Germi livre un portrait au vitriol des « mâles » italiens qui se voient tous tournés en ridicules, empêtrés dans des traditions d’un autre âge et des codes d’honneur grotesques, symboles d’une société profondément malade. Assez cruel par moments, Germi réussit avec ce film une œuvre qui est depuis entrée au panthéon des grandes comédies à l’italienne et fait figure désormais de classique du genre.

Il n’en est certes pas de même pour Les Lycéennes redoublent, réalisé presque quinze ans plus tard par un cinéaste rarement cité dans les dictionnaires. Ce film fait partie d’un sous-genre de la comédie italienne apparu dans les années soixante-dix, que l’on nomme généralement la « sexy-comédie ». Il s’agit de toute une série de bandes à l’humour peu raffiné, mettant systématiquement en vedette une superbe créature féminine lâchée dans un univers masculin où elle va faire des ravages, dans tous les sens du terme : ce peut être « La Toubib », « L’infirmière », « La Prof » etc.. Edwige Fenech a été l’une des plus grandes vedettes du genre. Si l’érotisme de ces films est assez léger,  l’humour y est généralement très lourd ! Toutefois, ces films, qui appartiennent au registre du cinéma bis, c’est à dire du cinéma populaire à petit budget produit en série, ont fait les beaux jours des salles de quartier ou de banlieue, aussi bien en Italie qu’en France. Le film retenu appartient à la série des aventures de « La Lycéenne », incarnée généralement par la très belle Gloria Guida. On constatera en revoyant cet épisode (un des plus intéressants de la série) qu’en fait les cibles traditionnelles de la comédie italienne se retrouvent dans ce film « de second rayon », sous une forme encore plus brutale et transgressive. Les adultes mâles sont de parfaits crétins, le « fiancé officiel » un séducteur minable et hypocrite. La furie anarchisante de ce film comique lié à l’érotisme naturel de son héroïne en fait une pièce de choix pour les amateurs.

Laurent Aknin

Laurent Aknin,  est un critique et historien du cinéma. Il collabore à de nombreuses revues spécialisées comme L’Avant-scène cinéma, Mythologie (s). Il signe de nombreux ouvrages collaboratifs sur le cinéma et son histoire (Analyse de l’image – 2005 ; Le Péplum – 2009 ; Mythes et idéologie du cinéma américain – 2012 ; Star Wars – Une saga, un mythe – 2015, etc.) et participe à de nombreuses émissions de radio. Il anime régulièrement des séances au sein des cinémas en direction du tout public et des scolaires.

 

 

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