Archivi di cinema

« Mais peut-être chaque homme n’est-il pas homme;
et peut-être le genre humain n’est-il pas tout entier genre humain.
C’est là un doute qui vous vient, sous la pluie, quand on a des souliers troués,
de l’eau dans ses souliers troués, et que l’on n’a plus personne en particulier qui vous occupe le cœur,
que l’on n’a plus sa vie à soi, plus rien de fait et plus rien à faire,
plus rien même à garder, plus rien à perdre,
et quand on voit, par-delà soi-même, les massacres du monde. »
Elio Vittorini, Conversation en Sicile, 1938 (Ed. Gallimard 1948)

Archivi

« Ils étaient, avec leurs valises de carton et leurs bagages, sur un fragment de plage pierreuse, abritée par les collines, entre Gela et Licata: ils y étaient arrivés à la nuit tombante, et ils étaient partis à l’aube de leurs villages; villages de l’intérieur, loin de la mer, agglutinés sur les contrées arides de ce fief. Certains d’entre eux voyaient la mer pour la première fois. »

Ainsi commence Le long voyage de Leonardo Sciascia qui décrit le départ des migrants siciliens vers l’Amérique au début des années soixante. Un demi siècle plus tard, la Sicile et le sud de l’Italie sont plus que jamais des terres de départs : ceux des jeunes contraints de chercher ailleurs un emploi, et ceux des réfugiés qui débarquent sur les côtes italiennes pour continuer plus loin leur « long voyage ».

Archivi di Cinema revient sur les débuts de cette histoire de gares et de valises à travers quatre films rares provenant de l’Archivio Audiovisivo del Movimento Operaio e Democratico (AAMOD). Fondé en 1979 pour conserver et diffuser des documents audiovisuels historiques, la plupart des films de l’AAMOD sont issus des archives du Parti Communiste Italien.

> Lundi 13 mars à 19h30 : soirée à l’Institut culturel italien en présence de Antonio Bechelloni, historien spécialiste de l’immigration, et de Claudio Olivieri, responsable de la recherche et de la conservation des films de l’AAMOP.

> Samedi 18 mars à 17h : séance au Cinéma Jacques Tati en présence d’Antonio Bechelloni.

PROGRAMME

Fata Morgana
Lino del Fra, 1962, 11’
La « Fée Morgane » est le train qui arrive à Milan, le train des émigrants, les «terroni» du sud de l’Italie. Leur maison dans leur bras, ils débarquent avec leurs colis, leurs femmes et leurs enfants. Mais Milan est comme New York, Sydney, Caracas: des gratte-ciel et des hommes inconnus qui parlent une autre langue.

Il prezzo del miracolo
Sezione stampa e propaganda federazione Pci, 1963, 14’
L’année 1963 représente une césure dans l’histoire italienne : c’est le début du « centrosinistra » (centre-gauche) qui exclut du gouvernement le PCI (Parti Communiste Italien), le deuxième parti national. Cette même année voit naître Unitelfilm, la société fondée pour produire et diffuser les films de propagande du PCI tel que ce documentaire sur les coûts sociaux du miracle économique italien.

Deserto di uomini
Franco Taviani, 1965, 12’
Dans les terres de la Basilicate, l’exode migratoire a effacé la présence des hommes. Parmi les ruelles et les maisons misérables, seules les femmes sont restées. Avec leurs châles noirs, elles errent au milieu des ruines d’un village abandonné pour récupérer ce qu’elles peuvent. Au coucher du soleil, elles se mettent en marche avec leur maigre butin.

Radiografia della miseria
Pietro Nelli, 1967, 16’
Entre 1958 et 1963, 11 mille Siciliens ont quitté leur terre pour rejoindre le Nord de l’Italie. Le documentaire de Pietro Nelli, accompagné par le commentaire de Leonardo Sciascia et la musique de Egisto Macchi, revient sur les conditions de misère et d’abandon qui ont propulsé l’exode vers les régions industrialisées du pays.

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