Bruno Bozzetto, pionnier de l’animation italienne

Figure la plus emblématique et populaire du cinéma d’animation italien, Bruno Bozzetto né à Milan en 1938. Producteur/réalisateur indépendant (depuis 1958 : bientôt 60 ans !) de plus de 300 films, il est considéré aussi comme le plus grand bédéiste italien de son temps. Aussi nous a-t-il paru essentiel de donner un coup de projecteur sur la carrière atypique, non conventionnelle et non conformiste, un brin iconoclaste, de ce créateur d’histoires et d’univers très personnels, où visuel et rythme l’emportent sur le discours.

Cet inconditionnel de liberté, injustement méconnu en France, fait partie de la famille des facétieux insolents et insolites. Ni dogmatique, ni théoricien, il se plait à s’amuser pour nous amuser, principalement avec des thèmes ordinaires et quotidiens : l’absurdité de la violence et de la guerre, la pollution, le sexisme, le chauvinisme, le fanatisme, la mauvaise foi, l’hypocrisie de la politique, la bureaucratie…bref il épingle les préoccupations de tout un chacun victime de la stupidité humaine. Il aime à porter, sans moralisation, un regard critique (amusé et amusant) sans concession, celui d’un « homme ordinaire qui parle à l’homme ordinaire » en butte à notre Humanité bien inhumaine.

Observateur pince sans rire invétéré et passionné, il manie humour noir ou rose, parodie et ironie irrévérencieuses, parfois de manière cinglante, mais jamais méchante, n’ayant de cesse d’inventer des choses nouvelles, osant même réaliser des longs métrages ! De manière artisanale, pragmatique. Parti de l’esthétique traditionnelle dominante à ses débuts (dessin animé à la Disney), il s’est lancé depuis les années 90 avec succès (mais toujours sur les mêmes thématiques) dans la réalisation (plus rapide et économique) de très courts métrages qui font mouche, à partir de logiciels vidéo « basiques » (flash) ; une manière efficace pour épurer histoires et sujets, mais aussi diffuser facilement ses œuvres sur la toile ! Cela ne l’a pas empêché de continuer à engranger dans les Festivals du monde entier, jusqu’en 2015, prix et distinctions, tout en préservant jalousement son autonomie et son indépendance, à l’écart des grands circuits commerciaux.

Le talent de Bozzetto est reconnaissable à son style ou plutôt ses styles très singuliers. Son art insolite est unique, donc inclassable : il est aussi à l’aise dans des formes luxuriantes, débridées, fantasmagoriques (comme dans son mythique long métrage « Allegro Non Troppo »), que dans des formes « minimalistes » (comme dans « I Due Castelli » et ses derniers opus vidéo). L’une des qualités essentielles du Maestro réside dans le sens du tempo, de l’efficacité du gag (à la Tex Avery) et de la chute, grâce à une parfaite osmose entre image et son, grâce à l’utilisation d’effets sonores cocasses et de savoureuses créations musicales. A l’instar de Norman McLaren ou de Paul Driessen, eux aussi artistes « solitaires », travaillant artisanalement avec de très petites équipes, où « l’oreille voit, l’œil écoute ». Après la création de deux longs métrages WEST AND SODA (1965-parodie de western) et VIP MIO FRATELLO SUPERUOMO (1968- parodie de B.D d’aventures), il signe ALLEGRO NON TROPPO (1977), qui est considéré comme son œuvre de référence. Christian Richard

LE MONDE ANIMÉ DE BOZZETTO – Ciné-conte
Bruno Bozzetto, 1958 à 2014 – 1h30
A partir de 9 ans
Bozzetto-animé
Ce programme, composé d’œuvres sans paroles, donne la possibilité au jeune public de découvrir l’univers insolite du plus grand réalisateur de « dessin animé » italien, Bruno Bozzetto. C’est aussi l’occasion pour les enfants d’aller de découvertes en découvertes, de surprise en surprise. Onze de ces courts métrages à l’esthétique, au style et au rythme variés, témoins de la richesse de la palette du réalisateur, seront proposés sous la forme d’un ciné-conte animé par le conteur Sami Hakimi qui se lance le défi de répondre à chaque film par une histoire de son répertoire.
MERCREDI 21 MARS À 15H

WEST AND SODA
Bruno Bozzetto, 1965 – 1h30
west and soda
Le film reprend les personnages classiques de Western et raconte l’histoire de Cattivissimo, un bandit avide d’argent qui essaye de contraindre une femme (Clementina) de l’épouser, pour ensuite reprendre le contrôle de ses terres. Mais c’est sans compter sur l’arrivée d’un étranger, Johnny, qui va reprendre la ville en main. Ce Western « à l’italienne » reprend des classiques de la littérature en faisant écho à la Commedia dell’arte ou la satire, tout en s’appuyant sur le travail du père du western spaghetti, Sergio Leone.
DIMANCHE 18 MARS À 14H30

VIP MIO FRATELLO SUPERUOMO
Bruno Bozzetto, 1968 – 80 min
Vip_mon_frere_superman
Le film raconte l’histoire de SuperVip, un beau et puissant super héros, aux côtés de miniVip, son frère petit et maladroit. Tous deux essayent de sauver le monde à travers une série d’aventures. Sorti en 1968, le choix des thèmes de ce film ont sans aucun doute été inspirés par le contexte de l’époque. On assiste à un réel travail de synthèse des éléments culturels présents à la fin des années ‘60, ainsi qu’à une parodie des langages sociaux et médiatiques.
SAMEDI 17 MARS À 16H. RENCONTRE AVEC CHRISTIAN RICHARD, SPÉCIALISTE DE L’ŒUVRE DE BOZZETTO.

ALLEGRO NON TROPPO
Bruno Bozzetto, 1977 – 85 min
allegro-non-troppo
Cette parodie de Fantasia est composée de six épisodes alternant dessins animés et acteurs réels. Bozzetto met en scène, entre autres, un présentateur audacieux, un orchestre de vieilles femmes dirigé par un chef tyrannique, le tout saupoudré de sous-entendus, sur fond de musique classique. Cette œuvre est certainement la plus significative de Bozzetto, de par sa complexité stylistique et son rapport avec la musique. Contrairement à Disney qui s’est concentré sur une illustration essentiellement graphique, Bozzetto a essayé de raconter des histoires en suivant la musique.
SAMEDI 17 MARS À 18H. RENCONTRE AVEC CHRISTIAN RICHARD

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